Un brise-vue est un écran opaque (panneau, lattes, végétation haute…) fixé sur une palissade, un balcon, une terrasse ou implanté dans un jardin pour augmenter l’intimité de votre espace extérieur. Ce type d’installation est courant pour se protéger du regard des voisins ou du vent, mais il ne peut pas être posé n’importe où ni de n’importe quelle façon.
En France, les brise-vues sont soumis à des règles d’urbanisme et de droit civil qu’il est essentiel de connaître. Par exemple, la loi ne fixe aucune hauteur maximale pour un mur ou une clôture (et donc a fortiori pour un brise-vue), mais elle interdit tout « trouble anormal du voisinage » (perte de vue, de lumière, etc.). De même, tout brise-vue doit être placé dans les limites de votre propriété et ne pas empiéter sur le terrain voisin.
Dans ce guide, nous passons en revue l’ensemble des règles applicables aux brise-vues (Code civil, urbanisme, copropriété) et donnons des exemples jurisprudentiels pour illustrer.

Réponse rapide concernant la réglementation d’un brise-vue : le brise-vue doit rester sur votre terrain, respecter les hauteurs minimales imposées (2,6 ou 3,2 m selon la commune), et éviter tout « trouble anormal du voisinage ». En copropriété, l’accord du syndicat ou de l’assemblée peut être nécessaire, il faut donc se renseigner.
Règlementation générale des brise-vues
Autorisation et déclaration préalable
La pose d’un brise-vue ne nécessite généralement pas de permis de construire, sauf dans des cas particuliers (secteur sauvegardé, site classé, PLU local très restrictif, etc.). En maison individuelle, il suffit souvent de respecter le Plan Local d’Urbanisme (PLU). Par contre, une déclaration préalable de travaux est normalement requise si votre brise-vue sert à clore totalement ou partiellement votre terrain. En pratique :
- Si le brise-vue fait office de clôture (ou est intégré à une clôture) et mesure 2 m ou plus, vous devez déposer une déclaration préalable en mairie.
- Brise-vue sans clôture intégrée, l’installation d’un simple écran de jardin ne déclenche pas forcément de formalités, sauf PLU local particulier. Pas de déclaration préalable si votre brise-vue n’est pas destiné à clore totalement ou partiellement votre parcelle.
Astuce MonBriseVue : si vous installez votre brise-vue AVANT une éventuelle modification du PLU, vous n’aurez pas à le démonter plus tard, le PLU n’étant pas rétroactif.
Pour être sûr, si vous comptez installer un brise-vue, renseignez-vous sur la réglementation en vigueur auprès du service urbanisme de votre mairie et vérifiez le PLU : certaines communes imposent des règles (type de matériau, couleur, hauteur minimale, etc.).
Par exemple, dans les zones historiques ou près d’un monument classé, une autorisation spéciale (préfectorale) peut être exigée. En copropriété, il faut aussi consulter le règlement de copropriété car certains interdisent purement et simplement les brise-vues sur les balcons ou façades pour préserver l’harmonie de l’immeuble.
Hauteur et distances légales des brises-vues
La loi prévoit des distances minimales à respecter vis-à-vis du voisinage :
- Vues droites (fenêtres, portes-fenêtres) : au moins 1,90 m entre l’ouverture et la limite du terrain voisin (art. 678 du Code civil). Cela signifie qu’une fenêtre doit être située à au moins 1,90 m du bord séparant deux propriétés pour interdire toute vue directe non autorisée. Un brise-vue peut justement empêcher cette vue litigieuse.
- Vues obliques : au moins 0,60 m (art. 679 du Code civil).
- Distance des plantations : l’article 671 du Code civil fixe 50 centimètres de distance par rapport à la limite séparative si la haie (ou plant) ne dépasse pas 2 m de hauteur, et 2,00 m de distance si elle dépasse 2m de hauteur. En d’autres termes, toute haie ou écran végétal de plus de 2 m doit être planté à au moins 2 m du terrain voisin.
Astuce MonBriseVue : posez toujours votre brise-vue (surtout végétal) à l’intérieur de votre terrain, sans jamais empiéter sur la propriété voisine. Dans un sens, cela paraît logique, et évite tout litige de voisinage.
Sur le plan de l’urbanisme, gardez en tête : la loi n’impose pas de limite supérieure de hauteur pour un mur ou un brise-vue. En revanche, la réglementation nationale suggère de viser au moins 2,60 m de hauteur dans les communes de moins de 50 000 habitants (3,20 m dans les autres) si aucun règlement local ne s’y oppose. Ce sont en fait des minimums hérités des règles sur les clôtures, au-delà de ces hauteurs, une déclaration préalable est requise (voir ci-dessus).
Réglementation brise-vue balcon
Sur un balcon d’immeuble, la pose d’un brise-vue relève souvent du droit de la copropriété. En effet, les balcons sont généralement considérés comme “parties communes à jouissance privative attachées à un lot”.
La loi ELAN de 2018 a introduit cette notion dans le statut de la copropriété : l’article 6-3 dispose que « le droit de jouissance privative est nécessairement accessoire au lot de copropriété auquel il est rattaché ». Concrètement, cela signifie que votre droit d’utiliser le balcon vous suit (et suit votre appartement) lors d’une vente.

Techniquement, en copropriété, vous ne pouvez pas modifier le balcon de façon substantielle sans passer par l’assemblée générale. Un copropriétaire peut installer un brise-vue sur son balcon « pour des petits aménagements ou éléments amovibles sans autorisation », mais tout gros travaux ou changement notable (hauteur > règlement, matériaux opaques,…) doit être voté en Assemblée Générale.
En pratique, vérifiez d’abord le règlement de copropriété : beaucoup précisent que le syndic ou l’assemblée doit autoriser tout occultant de balcon.
La jurisprudence rappelle que l’AG peut même imposer un brise-vue pour sauvegarder l’harmonie collective.
Astuce MonBriseVue : quand le règlement de copropriété définit un balcon en usage privatif, c’est lui qui précise qui paie l’entretien. Par défaut, le propriétaire du lot prend les frais à sa charge, dont le brise-vue qui peut y être installé.
Cas de jurisprudence réel concernant l’installation d’un brise-vue :
Dans une affaire récente, la Cour de cassation (3ᵉ civ., 22 juin 2022) a rejeté la contestation d’un copropriétaire qui refusait qu’on lui impose un brise-vue sur la terrasse à côté de son appartement. Les juges ont estimé que l’écran n’altérerait pas la jouissance du balcon ni l’harmonie de l’immeuble. Ainsi, l’assemblée générale n’a pas commis d’abus de majorité (code civil art. 1240 et loi 10 juillet 1965, art. 10), car aucune nuisance significative pour les autres n’a été démontrée.
Astuce MonBriseVue : avant de poser un brise-vue sur votre balcon, signalez-le au syndic et demandez l’avis de vos voisins. Un accord à l’amiable (voire une décision en AG) évite les conflits.
Réglementation des brise-vues en terrasse
Les terrasses peuvent se présenter sous deux formes principales : soit comme une terrasse de toit/rez-de-chaussée faisant partie de l’immeuble en copropriété, soit comme une terrasse de maison individuelle.
- Terrasse en copropriété : c’est souvent une « toiture-terrasse » ou un petit jardin commun. Elle est généralement considérée comme une partie commune à usage privatif attachée à un lot. En pratique, les mêmes règles que pour le balcon s’appliquent : il faut regarder le règlement de copropriété et l’assemblée générale pour tout brise-vue fixe. Un brise-vue ajouté sur une terrasse commune ne doit pas nuire aux autres copropriétaires (ex. : perte de vue, de lumière ou danger).
- Terrasse privée (maison individuelle) : la terrasse extérieure d’une maison est traitée comme une clôture ou un aménagement de jardin. En l’absence de règle locale, les règles générales s’appliquent. Ainsi, comme indiqué ci-avant, une déclaration préalable est requise si le brise-vue dépasse 2 m de haut ou modifie notablement l’aspect extérieur. Il faut aussi respecter les distances de plantation ou de vue évoquées plus haut : par exemple, un mur de terrasse grillagé avec des plantes grimpantes se conformera aux art. 671 et 678 du Code civil (0,50 m ou 2,00 m de distance, et 1,90 m pour toute ouverture).

Le code de l’urbanisme énonce également que tout aménagement d’extérieur doit être « en harmonie avec l’environnement » (art. R. 111-27). Concrètement, on évite les couleurs criardes et on veille à ne pas créer de danger (un brise-vue mal fixé peut être dangereux en cas de vent violent).
Astuce Monbrisevue : si vous installez un brise-vue végétal (haie, bambou, etc.) de plus de 2 m, souvenez-vous de l’obligation légale : plantez-le à au moins 2 m de la clôture. Et évitez les plantes qui risquent de déborder chez le voisin, pour ne pas déclencher un litige.
Jurisprudence et brise-vue : quelques cas réel de justice
Plusieurs décisions de justice illustrent les principes entre règlements et brises-vues : en général, les juges cherchent un juste équilibre entre l’intimité recherchée et le droit des voisins.
- Cass. 3ᵉ civ., 22 juin 2022 (n°21-17.071) – Le copropriétaire contestait une Assemblée Générale qui lui imposait un brise-vue sur la terrasse de son appartement. La Cour de cassation a confirmé que cette obligation était légale : le copropriétaire n’avait pas prouvé que l’écran modifierait significativement la jouissance de la terrasse ni l’harmonie du bâtiment. En clair, si le brise-vue ne cause pas de nuisance avérée (perte de vue, de lumière, danger…), son installation peut être exigée par l’AG au nom de l’intérêt collectif.
- Cass. 3ᵉ civ., 28 mars 2024 (n°22-13.993) – Dans une affaire de servitude de cour commune, la Cour a rappelé l’exigence de proportionnalité des sanctions. Elle a notamment relevé « l’absence de préjudice causé par la fenêtre litigieuse en raison d’un brise-vue installé par la SCI ». Autrement dit, la présence d’un brise-vue protégeant le terrain voisin supprimait le préjudice lié à une ouverture contestée. Cette décision confirme que l’installation d’un brise-vue peut neutraliser la nuisance d’une vue interdite (art. 678 c. civ.), et que les juges doivent toujours envisager des solutions alternatives avant d’ordonner une démolition.
- Cass. 1ʳᵉ civ., 15 janvier 2025 (n°23-12.184) – Un propriétaire voisin voulait ériger un brise-vue rigide de 2 m. La cour d’appel l’avait autorisé, mais la Cassation a cassé uniquement cette autorisation pour vice de procédure (excès de pouvoir). Cette décision illustre que même si la hauteur demandée (2 m) est conforme à la loi, la procédure civile (article 122 CPC) doit être respectée : ici, la cour d’appel n’aurait pas dû statuer au fond après avoir rejeté une demande faute de forme.
Ces exemples montrent que la validité d’un brise-vue dépend avant tout de son impact réel. Tant qu’il ne porte pas atteinte « de façon excessive » aux droits du voisin (luminosité, vue, sécurité) et qu’il respecte les règles d’urbanisme, l’installation est généralement admise.
Astuce MonBriseVue : en cas de doute, consultez un avocat ou le syndic. Mieux vaut régler à l’amiable l’installation (convention de mitoyenneté pour partage des frais, par ex.) que de risquer une procédure judiciaire coûteuse. Une bonne communication avec vos voisins et la lecture attentive de votre PLU et de votre règlement de copropriété vous éviteront bien des ennuis.